Crise, plan de continuité et EFQM

Un geste barrière interrompt l'effet domino
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Que vous soyez confiné chez vous en télétravail ou en train de gérer la crise sur le terrain dans votre société, en sous- ou en surproduction, vous vous posez forcément des questions existentielles : pourquoi n’avons vu rien venir ? Quel sera notre lendemain ? Comme s’en sortir sans trop de dégâts ? etc.

Établir un plan de continuité

Tout d’abord il faut déculpabiliser. Si vous n’avez pas vu la crise arriver, dites-vous que vous n’êtes pas les seuls ! Et il est difficile d’anticiper toutes les sortes de catastrophes qui peuvent arriver. En revanche, disposer d’un plan de continuité d’activité est indispensable : avoir réfléchi en amont (à froid) à une répartition des tâches au sein des équipes, avoir à disposition rapidement les contacts essentiels, avoir clairement prévu du matériel de crise au-delà des masques qui font polémiques, tel que du matériel informatique adapté par exemple, etc.

Apprenons plutôt de cette crise —et dès la fin advenue, capitalisons en structurant un Plan de continuité d’activité pour éviter de devoir redécouvrir tout à la prochaine crise… qui arrivera, c’est inéluctable. Cette démarche doit également pouvoir se faire conformément à la norme ISO 22301:2019 Sécurité et résilience — Systèmes de management de la continuité d’activité.

Changer de paradigme

Et après ? Toute crise d’ampleur conduit, implacable logique, à un changement de paradigme. Il est bien trop tôt pour savoir comment le monde évoluera, même si on sent déjà des tendances se dessiner. L’une d’elles est que les entreprises performantes de demain devront avant tout être agiles, c’est-à-dire capables de se réinventer en peu de temps : convertir une chaîne de fabrication à moindre coût, réorganiser la chaîne logistique, produire autrement (y compris dans le sens du bien commun pendant la crise : reconversion pour faire des masques, du gel hydroalcoolique, des pièces de respirateur artificiel en impression 3D, dans le cas présent, etc.). Tout cela implique d’avoir appris de la crise du Covid en développant des propriétés d’antifragilité (propriété des systèmes qui se renforcent lorsqu’ils sont exposés à des facteurs de stress ou à une source de nuisance) en s’appuyant à la fois sur des structures organisationnelles adaptées mais aussi sur du personnel sachant être flexible et autonome.

L’analyse menée par l’EFQM en 2019, en amont de son nouveau modèle de management, a mis en évidence que les organisations performantes de demain devront intégrer neuf (9) grandes tendances (megatrends).

Pour en savoir plus, voir la conférence de Foucauld de Lauzon, General Manager EFQM France (AFNOR Group).

À relire également sur le même sujet l’article de Stéphane Verdoux.

Bien appréhender les 9 Megatrends EFQM

Voyons-en en quoi ces neuf Megatrends sont particulièrement en phase avec la situation actuelle :

1. « Manager la diversité démographique et sociétale »

Il faut savoir utiliser la diversité de la population (sociale, culturelle, âge, etc.) et capter les attentes des plus jeunes, différentes de leurs aînés, pour en faire une richesse et développer l’agilité et l’adaptabilité de l’organisation : par exemple savoir utiliser les réseaux sociaux pour échanger, trouver de nouveaux procédés ou produits, détourner intelligemment des objets en période de crise etc. Pendant cette crise les exemples foisonnent sur ce sujet et les jeunes générations y ont beaucoup contribué.

2. « Des équipes autonomes et une entreprise responsabilisante »

Pour être performante, l’organisation a besoin de personnel engagé. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas de chef mais celui-ci doit savoir passer du mode directif pur et dur au rôle de coach. Un chef qui passe son temps derrière son personnel à tout vérifier ou à ordonner à son personnel d’avancer sans dire où on va, et pourquoi, n’a plus sa place dans la société de demain, il faut responsabiliser tout le personnel : chacun à son niveau doit savoir en quoi il contribue à l’objectif global. En cette période troublée, où les initiatives de tous foisonnent, il faut les canaliser en veillant au renforcement positif. Le chef devient un chef d’orchestre donnant le rythme mais faisant converger tous les talents individuels.

3. « Une économie collaborative fondée sur le paradigme de la confiance »

La tendance au partage des ressources telles que voitures, locaux, etc. est une tendance de fond. Elle sera d’autant plus critique si le monde prend le chemin de la décroissance où les moyens seront limités. L’économie collaborative permettra de créer de nouvelles activités par l’échange technique et le partage de technologies. Il faut donc l’intégrer dans l’approche de l’entreprise de demain et rester ouvert d’esprit aux autres.

Une économie collaborative fondée sur le paradigme de la confiance

4. « L’accélération des technologies et la disruption digitale »

Cette crise nous force à changer notre façon de communiquer notamment du fait du développement du télétravail y compris pour et avec nos enfants, les réunions en téléconférence, etc. Certes nous avons besoin de rencontrer nos collègues car nous sommes avant tout des êtres sociables. Cependant ces nouveaux moyens peuvent aussi nous permettre de gagner du temps pour être plus efficaces, plus efficients. En outre, les imprimantes 3D, la blockchain, le big data, l’IA, les réseaux et la digitalisation contribuent tous les jours à apporter de nouvelles solutions. Nous devons intégrer toutes ces techniques dans les nouveaux modèles d’organisation qui nécessiteront toujours des femmes et de hommes compétents, toutefois plus polyvalents, avec des soft skills leur permettant de s’adapter aisément à de nouveaux métiers ainsi qu’à des modes de production certainement différents.

5. « L’intensification des besoins en compétences et des effets d’automatisation »

Jusqu’à présent, l’imaginaire collectif nourri de films d’anticipation a pu nous faire penser que certains métiers disparaîtraient à coup de robots et d’Intelligence Artificielle : aide à la personne, traitement des déchets, agent de contrôle, etc. Cependant aujourd’hui, notamment après cette crise hors normes, nous voyons que nous avons plus que jamais besoin de personnel hospitalier dévoué et disponible —y compris d’aides-soignantes, d’ambulanciers et d’infirmières—, d’agents d’entretien, d’aide-ménagères, ainsi que de personnel technique, de scientifiques et d’ingénieurs capables de s’adapter à des circonstances exceptionnelles et à l’incertitude. L’automatisation devra rester au service des hommes. Il sera toujours fait appel au cerveau humain plus qu’à l’IA pour résoudre ces problèmes concrets. Nul ne peut ignorer que vivre seul entouré de robots n’est pas souhaitable, dans le fond. La réalité vécue par un malade conscient, isolé dans sa chambre, qui n’a pour seule compagnie que la visite trois fois par jour de personnel équipé de la tête au pied, est déjà très lourde. Le temps paraît long. Les brefs échanges avec ceux qui prennent soin de lui sont d’autant plus précieux. Que dire si ces tâches étaient confiées à des robots ? Dans le nouveau mode il faut le personnel au centre de la vie, qu’il soit bien formé pour être capable de s’ajuster rapidement aux changements, même à ceux qu’il n’est pas possible d’anticiper.

6. « La réponse à des réglementations de plus en plus nombreuses »

Le monde dans lequel nous évoluons est régi par une inflation de lois et de règlements toujours plus lourds. Le confinement, parfaitement justifié au demeurant, qui réduit les libertés de mouvement et encadre le travail de façon temporaire, en est un criant exemple. Au lieu de perdre son temps à se lamenter sur les contraintes et les règlements, au lieu de s’inquiéter, l’entreprise doit plutôt se montrer suffisamment agile pour s’adapter et savoir tirer parti de la situation. À elle d’agir pour infléchir les événements et, comme à l’aïkido, utiliser la force adverse en sa faveur. En se montrant citoyenne, par la connaissance de son environnement et son implication avec ses parties prenantes, elle sera en mesure d’apporter une contribution positive à son écosystème.

Infléchir les événements pour tirer parti de la situation

7. « La raréfaction des ressources »

Alors qu’on avait conscience avant cette crise de la raréfaction de certaines ressources comme le gaz, le pétrole, les métaux etc., on s’aperçoit que certains produits que l’on considérait jusqu’à présent comme très secondaires comme les masques, le gel hydroalcoolique, le papier toilette, les pâtes alimentaires, la farine, etc., peuvent devenir en quelques jours des denrées indispensables au point de voir les pires comportements humains se déchaîner (vol, marché noir, détournement de cargaison, etc.). Dès lors, chaque entreprise doit identifier la criticité de ses besoins. Cette analyse doit conduire à trouver des alternatives pour les fournitures critiques et/ou pour sécuriser les approvisionnements. Cela devrait aller sans dire mais ne semble pas si évident au regard de ce qui est advenu relativement aux masques. L’analyse après la crise de cette incroyable défaillance nous en apprendra beaucoup mais ce qui est d’ores et déjà acquis, c’est que toute analyse de la valeur d’un produit ou service doit commencer par l’identification de la criticité de ses constituants (5M). N’oublions pas que rareté rime avec manque : la rareté disparaît avec l’absence de besoin (ce qui est typiquement le cas du pétrole pendant la crise, soit dit en passant).

8. « La crise environnementale et le changement climatique »

La chute spectaculaire des consommations d’énergie et l’amélioration de la qualité de l’air consécutives à la crise du Covid-19 ne doivent pas nous faire oublier que le changement climatique est en cours. L’entreprise de demain devra intégrer dans son modèle économique une réduction de son empreinte environnementale et donc probablement décarboner. « Choisir pour l’Europe une trajectoire de développement sobre en énergie, décarbonée, circulaire, inclusive et digitale, qui rééquilibre nos relations au vivant. », selon les mots d’Emmanuel Faber, Chairman & CEO Danone.

Profitons donc de cette crise pour prendre de bonnes habitudes, par exemple limiter les déplacements inutiles en généralisant les téléconférences, développer le télétravail. Utilisons la créativité de tous pour réinventer l’entreprise de demain.

9. « L’incertitude géopolitique et localisation des chaînes de valeurs »

Cette tendance qui avait été identifiée par l’étude de l’EFQM présentée fin 2019 apparaît tellement évidente aujourd’hui. Au moment où les échanges internationaux sont quasiment gelés, les produits locaux prennent de la valeur. Notre économie basée sur la globalisation en a pris un coup sur le museau. Relocaliser certaines productions jugées critiques semble inévitable mais la réflexion doit aussi être menée au regard des évolutions politiques à venir. Le nationalisme exacerbé de certaines démocraties pose des problèmes. Chaque entreprise doit intégrer dans sa réflexion le contexte géopolitique changeant et se montrer capable de réajuster rapidement son développement en tenant compte des données.

Penser localement, agir globalement

Conclusion

En rapprochant la situation actuelle des 9 tendances identifiées par l’EFQM, on se rend compte de l’évolution nécessaire que doivent faire toutes les entreprises qui veulent aborder l’avenir avec plus de sérénité : connaître et qualifier ses parties prenantes, les intégrer dans sa stratégie, s’ouvrir au monde pour être capable de réagir vite en cas de changement, avoir du personnel compétent, flexible, formé, motivé, impliqué et responsabilisé, utiliser les nouvelles technologies pour limiter son empreinte carbone et optimiser ses productions, revoir ses chaines de valeur en intégrant la criticité des constituants et leur localisation et surtout d’anticiper une crise en rédigeant un plan de continuité par exemple. Devenons encore plus agiles.

Le modèle de l’EFQM 2020 peut nous aider à quantifier le niveau de management de toute organisation quelle que soit sa taille et son activité. Cela peut être un bon moyen de s’évaluer et de grandir. Une première approche peut se faire au travers des Prix organisés par l’AFQP.

Prenons le temps d’y réfléchir ensemble. N’hésitez pas à me faire part de vos remarques 

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Squalean est un cabinet-conseil engagé dans la Précellence en management ou triple excellence – règlementaire, opérationnelle et citoyenne –.
Conciliant efficience économique et éthique des affaires, Squalean déploie sa démarche de progrès permanent par transfert de compétences du plus opérationnel au plus stratégique et vice-versa.

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