La Raison d’Être

Fleurs de cerisier
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Conséquence du vote de la loi PACTE, la raison d’être s’impose dans le paysage des affaires en France ; et dans beaucoup d’autres pays aussi, bien entendu. La question de sa raison d’être — je veux parler de la raison d’être de la raison d’être —, mérite qu’on s’y arrête et qu’on y réfléchisse sérieusement. Une fois n’est pas coutume, je m’exprimerai à la première personne dans un article un peu personnel qui ne prétend pas refléter la voix de Squalean mais plutôt ma sensibilité propre. Au fond, je pense qu’il reste encore quelques nuances sur la manière d’envisager et de formuler les choses au sein de notre petite équipe. Le débat persiste. Il se prolonge, vivant et fertile. Il nous permet d’avancer et d’affiner la vision partagée en toute confiance.

Gants de boxe du Père-Noël

Un match de boxe

À ma droite, les tenants d’une orthodoxie libérale des affaires. Quoique très innovants dans leurs idées sur bien d’autres aspects, ils défendent que la raison d’être serait, ne tournons pas autour des mots, une supercherie et une imposture.

À ma gauche, les adeptes de la raison d’être. Ils prétendent à une révolution des valeurs autour d’une nouvelle responsabilité de l’entreprise dans le sens de l’intérêt général et pour le bien commun.

Feng-Shui

Les promoteurs du concept

Les promoteurs du concept considèrent qu’un manque était à combler. Jusqu’à présent, les sociétés n’exprimaient pas clairement leur ambition d’utilité sociale et ne prévoyaient pas de disposer de moyens pour contribuer aux grands défis sociaux, sociétaux et environnementaux de la planète. Je veux parler des ODD et de l’Horizon 2030, en particulier. Ils ont milité en faveur de la loi PACTE pour que la raison d’être prenne un tour juridique, que soit prévue sa formulation dans les statuts d’une société qui, dès lors, se dotera d’objectifs précis, donc quantifiables, et de moyens pour les mettre en œuvre, les mesurer et les contrôler.

Derrière le modèle, il y a donc l’idée sous-jacente que la société élargit sa responsabilité au-delà de la sphère économique en se donnant mission de résoudre des problèmes d’intérêt supérieur moyennant une contribution visible et explicite aux côtés des autres acteurs que sont les États, les organisations supranationales, les ONG, les associations, etc. Il y aussi l’idée qu’elle s’y contraigne, sinon qu’elle y soit contrainte.

La figure de proue de ce mouvement est la Communauté des entreprises à mission qui fédère les impétrants : Camif, MAIF, La Poste, Lea Nature, Suez Consulting, Ulule, etc.

Il y a bien sûr le vaisseau amiral, Danone et son PDG, Emmanuel Faber. La raison d’être de Danone est : « Apporter la santé par l’alimentation au plus grand nombre ». Elle se décline en mission d’entreprise : améliorer la santé avec des produits plus sains qui encouragent de meilleurs choix nutritionnels et de meilleurs pratiques alimentaires ; préserver la planète en soutenant l’agriculture régénératrice, le cycle de l’eau et l’économie circulaire des emballages ; construire le futur avec les équipes en s’appuyant sur l’héritage en matière d’innovation sociale ; et promouvoir la croissance inclusive en agissant pour l’égalité des chances et en accompagnant les acteurs les plus fragiles. Depuis fin juin 2020, Danone est la première et pour l’instant la seule société du CAC40 qui a le statut de société à mission.

Cela étant, la réalité économique rattrape les grands principes et Danone qui n’échappe pas à la logique concurrentielle, ni aux affres de la conjoncture, s’impose une cure d’amaigrissement avec la décision d’un plan social fin novembre, sous pression de l’actionnariat. « Nos actionnaires sont évidemment dans une situation difficile avec un cours qui a baissé de 30% depuis à peu près un an. » a déclaré Emmanuel Faber dans une interview à France Inter, le 24 novembre dernier.

Compas

Les arguments des pourfendeurs de la Raison d'Être

Je fais court sur l’idéologie monétariste incarnée par Milton Friedman. La raison d’être d’une société serait de satisfaire l’objectif de rendement du capital pour les actionnaires. Que l’argument soit éculé et dépassé est litigieux, le cas évoqué de Danone ne semblant pas signifier autre chose. Cependant, les néo-libéraux les plus orthodoxes n’oseraient plus l’affirmer de façon aussi véhémente.

Plus prégnant est le raisonnement : il n’y a rien de nouveau sous le soleil. La raison d’être est une vieille antienne déjà présente dans le discours des années 60, notamment sous l’aspect moralisant que lui confèrent les dirigeants d’obédience chrétienne, les WASP en particulier. On la trouve par ailleurs dans des recherches en stratégie qui avancent qu’elle aiderait les entreprises à garder le cap. Mais c’est un faible argument. Je me souviens avoir suivi mon premier cours de stratégie d’entreprise au milieu des années 80. Il démarrait par la lecture d’une étude faisant le parallèle entre des sociétés qui avaient formalisé leur stratégie et d’autres qui ne l’avaient pas fait, pour conclure qu’on ne pouvait rien conclure.

Aujourd’hui, la raison d’être répond à des attentes sociales et sociétales bien légitimes, mais ses contempteurs font valoir que le beau discours et les belles intentions se heurtent souvent à des réalités funestes, notamment en termes de management. « L’enfer est pavé de bonnes intentions » n’est pas qu’une formule au théâtre. Ce n’est pas parce que l’entreprise prétend à un grand dessein moral et sociétal que ses dirigeants sauront produire de grandes choses. L’histoire est en effet peuplée de leaders qui avaient des inclinations vertueuses et l’ambition de bien faire mais se sont fracassés sur la réalité d’un leadership indigent ou velléitaire, en tous cas médiocre et défaillant.

Ponton vers le soleil

Se recentrer sur la démarche

Le plus intéressant que j’aie lu à ce sujet est le fruit des réflexions de Philippe Silberzahn à EM Lyon. En résumé, il dit : « les gens sont plus sensibles à la façon dont les décisions sont prises qu’à la substance des décisions elles-mêmes. Autrement dit, ils accepteront plus facilement une décision, même s’ils ne l’approuvent pas, s’ils estiment qu’elle a été prise en respectant un processus juste (consultation, discussion des objections, etc.) tandis qu’une décision qui a été prise sans processus juste les laissera insatisfaits même s’ils l’approuvent. »

La raison d’être, suivant cette logique, est un concept qui s’éloigne du concret des processus et de la vie de l’organisation — un concept métaphysique prétend Philippe Silberzahn —. Il n’est pas en rapport avec la réalité modeste et laborieuses du quotidien des structures. Alors, plutôt que de brandir de grands principes et de s’astreindre à une finalité ésotérique, le chercheur en management recommande de revenir à un travail de terrain sur les méthodes de management autour de l’entreprise libérée et agile, de l’holacratie, des entreprises humanistes, etc. Pour parachever son raisonnement, il nous propose de considérer l’entreprise comme étant elle-même sa propre raison.

La question est moins
d’avoir une raison d’être
que d’être une raison d’avoir.

Sentier de montagne

Un chemin de crête accidenté

À bien y réfléchir, la loi n’a pas créé de révolution car elle n’est pas intransigeante. Elle n’impose rien. Elle propose et incite. Les entreprises qui ont le désir de se doter d’une raison d’être sont invitées à le faire mais rien ne les y oblige et tant qu’on en restera là, tout ira bien. Pour l’instant, je crois qu’il faut regarder la raison d’être, non pas comme une contrainte, mais comme une liberté supplémentaire accordée aux personnes morales. Je crois aussi qu’il faut rester en vigilance pour qu’elle ne devienne pas une injonction de plus qui s’abattra sur les dirigeants d’entreprises.

C’est un peu comme en littérature. Tant qu’on en reste à la contrainte voulue ou admise, il est loisible à chaque écrivain de relever des défis comme dans l’Oulipo. Certains, c’est le cas de Georges Pérec, ont fait des chefs d’œuvres sous impératifs. Et que dire de la règle des trois unités, sinon qu’elle a permis Corneille et Racine. Quant à ceux qui n’ont pas su en tirer parti… eh bien, ils sont tombés dans les oubliettes de l’histoire !

Le calme au bord de l'eau

Quant à Squalean, je soutiens l’idée que nous allions dans le sens de nous doter d’une raison d’être, librement, en prenant le temps de bien la définir, afin qu’elle accompagne la démarche de précellence en management que nous promouvons. Nous le ferons à notre rythme et surtout à notre manière inspirée par le concept japonais de l’Ikigaï que nous vous proposons de découvrir en visionnant la vidéo ci-après.

Et vous, quel est votre avis ? Nous adorerions recevoir vos commentaires en retour.

Pour en apprendre plus, consultez notre site à la page : https://squalean.fr/excellence-citoyenne/
et contactez-nous : https://squalean.fr/contact/.

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À propos de Squalean

Squalean est un cabinet-conseil engagé dans la Précellence en management ou triple excellence – règlementaire, opérationnelle et citoyenne –.
Conciliant efficience économique et éthique des affaires, Squalean déploie sa démarche de progrès permanent par transfert de compétences du plus opérationnel au plus stratégique et vice-versa.

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